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  • : SI ÇA VOUS CHANTE (le blog de Fred Hidalgo)
  • : Parce que c’est un art populaire entre tous, qui touche à la vie de chacun et appartient à la mémoire collective, la chanson constitue le meilleur reflet de l’air du temps : via son histoire (qui « est la même que la nôtre », chantait Charles Trenet) et son actualité, ce blog destiné surtout à illustrer et promouvoir la chanson de l’espace francophone ne se fixera donc aucune limite…
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  • Fred Hidalgo
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.

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18 mai 2020 1 18 /05 /mai /2020 09:23

« À prendre ou à lécher »*… par les affranchis


L’an dernier, les amateurs du Fou Écrivant (le plus lu du XXe siècle) ont célébré les 70 ans de son héros et alter ego San-Antonio (voir « San-Antonio sans alter ego »). Cette année, la Poste rend hommage à Frédéric Dard à l’occasion des vingt ans de sa disparition, le 6 juin 2000 (voir « San-Antonio fait chorus »), mais surtout en prévision du centenaire de sa naissance en 2021. Lui qui détestait les honneurs en tout genre, mais s’est toujours considéré (non sans humour) comme un « homme de lettres », en raison de sa venue au monde au-dessus d’un bureau de poste – chez un receveur des postes ! –, sûr qu'à se voir ainsi timbré, il se serait exclamé, comme San-Antonio en 1959 : Tout le plaisir est pour moi !a
_________
*Vous me direz que les timbres d’aujourd’hui ne se collent plus avec la langue, qu’ils sont autocollants. Soit ! Avec le temps tout se perd, comme les bas à jarretelles au profit de collants d'hommes-grenouilles, pas vrai San-A. ? Ça n’est pas une raison de se priver, pour autant, d’un titre alléchant, paru en même temps que le premier numéro de Paroles et Musique...

 


Voulez-vous que je vous dise ? En cette période si glauque où nombre d’entre nous ont perdu des proches ou des amis, ça fait un bien… fou de le voir ainsi timbré, en attendant de le découvrir oblitéré ; à moi, peut-être plus qu’au premier venu, qui l’avais « reconnu » déjà, tout minot, sans même savoir qui pouvait se cacher derrière ce nom étrangement hispanisant, alors que la mode littéraire était aux pseudos anglo-saxons (dix ans avant la vague de la chanson yéyé). San-Antonio !?... Comment aurions-nous pu imaginer à l’époque, moi, en lui adressant une lettre « fondatrice », lui en m’apportant (à ma grande surprise et pour mon plus grand bonheur) une réponse inoubliable, qu’un jour – plus d’un demi-siècle après ! – il nous serait possible de correspondre en affranchissant nos lettres à son image ?!

En 1990, déjà, on s’était réjoui quand la Poste française avait émis un timbre (à 2,80 F) à l’effigie de Jacques Brel (même si le portrait choisi, dessiné par Moretti, m’avait laissé dubitatif), mais surtout j’avais été comblé en découvrant sur place qu’en 2009 la Polynésie avait choisi de mettre le Grand Jacques à la une, à l’endroit même (un « pays » autonome, je vous le rappelle, avec son propre gouvernement) de son accessible étoile où l’avait mené l’impossible rêve de sa quête ultime (voir « Le voyage au bout de la vie »). Pour seulement 100 F Pacifique !

Et voici que pour moins d’un euro, le pays de Rabelais nous offre Frédéric Dard dit San-Antonio à prendre ou à lécher !

San-Antonio enfin timbré, pas trop tôt pour ce génial écrivain dont le succès populaire (donc suspect...) lui a trop longtemps valu, de son vivant, d’être enfermé dans des limbes d’indifférence voire repoussé dans un purgatoire de condescendance, par les tenants forcenés de l’agagadémisme et de la bien-pensance.

Cela me rappelle les réactions offusquées d’amateurs purs et durs de « la bonne chanson française » qui refusaient mordicus qu’on pût aimer, par exemple, un Brel et un Goldman en même temps (…alors que le répertoire de celui-ci, soit dit en passant, est infiniment brélien dans l’inspiration). Tant pis pour ces gens-là… Il suffit à mon bonheur de savoir deux ou trois petites choses… Que San-Antonio connaissait la chanson, qu’il était même avec Brel, dans sa loge, après sa toute dernière à l’Olympia… Ou qu’à défaut d’arriver à réunir Jean-Jacques Goldman (qui l’adorait) et Frédéric Dard (qui n’en pensait pas moins à son sujet), j’avais pu leur faciliter un rendez-vous téléphonique, diffusé en direct à la radio et tenu secret jusqu’au dernier moment (voir le verbatim intégral de leur conversation dans « Goldman Confidentiel »).

Bref ! Si vous mordez entr’ les lignes le topo que j’viens d’vous bonnir, les aminches, vous savez quoi faire la prochaine fois que vous aurez des velléités épistolaires, d’amour ou d’amitié ; a fortiori si votre bafouille est destinée au « Grand Connétable de la San-Antoniaiserie » :

l’orner du portrait dentelé (99 ans et toutes ses dents) du Grand Maître de l’Ordre (des plaisantins de bonne compagnie) ! Il ne vous en coûtera que 0,97 euro et une dose gracieuse de sympathie. Quant aux pisse-froid, aux pisse-chagrin, aux aboyeurs professionnels qui trouvent toujours à redire, bien planqués à l’arrière, à critiquer ce que font les autres, aux atrophiés du bulbe auxquels l’ouverture d’esprit est aussi étrangère qu’un semblant d’intelligence aux cons (« les seuls véritables étrangers de l’existence, disait Frédéric, contre lesquels s’exerce ma xénophobie »), quant aux trépanés de la membrane empathique, amputés des glandes lacrymogènes (dixit Bérurier) à force de s’autocastrer le rire salvateur, aux empêcheurs d’aimer (qui on veut) en rond, en long, en large et en travers, qu’ils se tranquillisent : personne ne s’avisera jamais de les regretter s’ils se décident à lâcher (enfin) la rampe !

Pour rire, justement (et pour la curiosité de l’affaire), je vous offre une chanson sur San-Antonio de 1981 tirée du navet « le plus pire » qu’on ait jamais « adapté » de son œuvre inadaptable à l’écran (réalisé par Joël Séria, pourtant, vous savez : Les Galettes de Pont-Aven, avec le regretté Jean-Pierre Marielle…). Interprétée par Robert Carpentier, composée par M. Stelio et J.P. Vinit, mais surtout écrite (commise ?) par le très talentueux et très sérieux Claude Lemesle, eh oui… Mais il lui sera beaucoup pardonné pour avoir eu Jacques Brel comme dieu et n’avoir pas craint, pour autant, de s’avouer idolâtre de San-Antonio !

Rappelons que, dans la seconde moitié des années 60, Frédéric Dard s’était lui-même essayé à l’exercice, sans prétention, en écrivant les paroles de la chanson San-Antonio, enregistrée par Félix Marten (sur une musique de Philippe-Gérard), ainsi que de la ritournelle préférée de Béru, Les Matelassiers, chantée par Bourvil (sur une musique de Jo Moutet). On peut les écouter dans mon premier sujet consacré à San-A. (« fait chorus ») sur ce blog.

Enfin, pour qui voudrait ne pas mourir idiot ou inculte (du Serial Virus Killer ou de connerie assumée), voici le communiqué officiel que La Poste va diffuser dès aujourd’hui, lundi 18 mai 2020, pour accompagner la sortie de son nouveau timbre (et je n’y suis pour rien*, s’il est – forcément – élogieux !) :

« Frédéric Dard est né le 29 juin 1921, à Jallieu (Isère), à l’étage situé au-dessus d’un bureau de Poste, ce qui, disait-il, le prédestinait à une carrière dans les lettres… Issu d’une famille modeste, il manifeste très tôt un goût immodéré pour la lecture. Influencé par des auteurs comme Georges Simenon ou Louis-Ferdinand Céline, il publie son premier livre, La Peuchère, en 1940. Touche-à-tout littéraire et stakhanoviste de la machine à écrire, il se frotte, sous son nom ou sous d’improbables pseudonymes, au roman populaire comme au conte pour enfants, en passant par l’écriture théâtrale ou les adaptations radiophoniques et les scénarios pour le petit et le grand écran. En 1949, en plein épanouissement du roman noir à l’américaine, il publie Réglez-lui son compte !, premier titre d’une série de plus de 180 livres mettant en scène le commissaire San-Antonio. Cette saga deviendra un raz-de-marée littéraire, transcendant tous les lectorats. La faconde, la truculence et la vitalité rabelaisienne de son héros et de son inséparable comparse Bérurier n’ont d’égales que son génie du verbe et ses fulgurances stylistiques. À raison de quatre titres par an, Frédéric Dard a créé un personnage-pseudonyme entré au panthéon des héros populaires.
 

Phénomène unique de la littérature française du XXe siècle, Frédéric Dard a publié près de 300 livres vendus à plus de 250 millions d’exemplaires et traduits en plus de trente-cinq langues. Tant par la diversité de sa production, que par l’art unique avec lequel il a renouvelé la langue, pourfendeur de la bêtise humaine à tous les étages, il est sans conteste l’une des figures majeures du patrimoine littéraire. Homme pudique et sensible, à la personnalité attachante, Frédéric Dard est décédé le 6 juin 2000, à l’âge de 78 ans. Il repose dans le cimetière de Saint-Chef (Isère), village où il a passé une partie de son enfance.

Ce timbre, célébrant les vingt ans de sa disparition, précédera d’un an les événements autour du centenaire de sa naissance. »
*Mais Éric Bouhier, auteur de l'excellentissime Dictionnaire amoureux de San-Antonio (voir mon sujet précédent sur San-A.) y est, lui, pour tout !

___________

DERNIÈRE HEURE – Je reçois, au moment même de mettre ce sujet en ligne, une information de La Poste, faisant état – compte tenu de l’impact de la crise sanitaire et du confinement sur ses programmations du premier semestre – du report au 15 juin de l’émission du timbre dardo-san-antonien. Dont acte… qui renvoie sans coup férir cet article du genre policier à celui de l’anticipation, en le rendant carrément « scoopesque ». On nous précise aussi, pour le cas où ça vous chanterait, qu’une avant-première de ventes d’enveloppes « Premier Jour » aura lieu à Paris, les 12 et 13 juin, à la librairie Carré d’Encre. Vous voilà affranchis de A jusqu’à Z !

________
PS. Pour rappel, une bonne adresse à recommander ici et orbi : le site de l’association « Les Amis de San-Antonio » (à partir duquel vous pourrez accéder à d’autres sites, blogs, pages et groupes également des plus recommandables) ; pour y adhérer, vous pouvez vous présenter de ma part, on vous y accueillera à bras ouverts. Avec l’historique de la revue éditée par l’association, Le Monde de San-Antonio (91 numéros parus depuis 1997), véritable mine d’or pour les passionnés... et les chercheurs universitaires, de plus en plus nombreux à s'intéresser à ce monde-là.

 

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24 août 2019 6 24 /08 /août /2019 08:51

L'art de tout dire, l'air de rien


De Gilbert Laffaille, Claude Nougaro disait : « Dès qu’il chante, en moi un oiseau fraternel s’éveille » ; Claude Duneton, lui, assurait qu’il « devrait être le dramaturge vengeur de notre temps. Il en a la puissance ricanante, les tripes, la lucidité, la souffrance, le talent authentique de l’écrivain pétri de langue, inspiré par la langue. » Plus modestement, mais il y a déjà près de quarante ans (et il n’en avait encore que trente-deux), je mettais l’accent (en ouverture de son dossier de Paroles et Musique) sur l’originalité de son style, quelque part – l’air de rien – entre Trenet, Boby Lapointe et Souchon… La parution de l’intégrale de ses chansons et sketches, « commentés par l’auteur », nous donne aujourd’hui l’occasion de parcourir le livre de sa vie d’artiste.

C’était drôle. Tout était drôle ! La chanson elle-même, finement parodique, qui s’en prenait – l’air de rien… – à la chasse à l’éléphant pratiquée par le président Giscard d’Estaing au Gabon. Et puis le sort funeste de ces deux bons gros pachydermes sans défense, « Mauricette et Frédo » pendant qu’ils se grattaient le dos… Incroyable ! Nous n’avions jamais entendu parler de ce jeune chanteur, vingt-neuf ou trente ans à ce moment-là, et pourtant il parlait de nous ! Comment avait-il su que nous existions, que nous vivions jusque-là au Gabon où, ayant créé le quotidien national L’Union, nous étions toujours informés des arrivées discrètes du « Président », venu chasser l’éléphant en brousse ?

Quoi qu’il en soit, l’achat immédiat de l’album confirma l’originalité et la qualité du Président et l’Éléphant. La naissance d’un style surtout, étonnant de maturité, qui mariait la révolte de ces années-là avec la finesse de trait d’un Dufy : Éducation nationale… On se retrouvait entièrement dans sa description sociale, dans notre souci d’écologie (Sans une ombre végétale, Tango pollué), d’humanisme et de féminisme, dans l’incitation brélienne à casser la routine (Histoire d’œil), dans la poésie minimaliste mais si éloquente d’une Chanson rose, chanson noire (en vers de trois pieds !), dans la philosophie existentielle d’un Verre d’eau pourtant bien ordinaire (« La réalité / C’est un arc-en-ciel / Il faut la chercher / Entre pluie et soleil »…), dans le désir amoureux d’un Dimanche après-midi ; dans la différence aussi (Chocolat et cerises) ou encore, sans hausser le ton, dans la dénonciation d’un monde médiatique sclérosé (et tellement cadenassé qu’il allait bientôt nous conduire, comme « Un cri dans le silence », à créer Paroles et Musique…), avec Le Bonjour d’Alfred – un titre qui m’allait bien aussi !

Coule, coule, robinet d’eau tiède
Fais glouglou dans le lavabo
Comme dirait l’ami Alfred
Ça remplace bien la radio
Mousse, mousse, savon, savonnette
Toi qui laisses la peau douce et lisse
Fais comme toutes ces chansonnettes
Qui dérangent pas la police…

Bref. À notre retour suivant en France (après que Claude Villers, en diffusant malicieusement Le Président et l’Éléphant sur France Inter, nous eut permis de découvrir cet auteur-compositeur-interprète à l’écriture aussi élégante que la mise d’un lord british, qui disait l’essentiel sans ostentation, sans avoir besoin d’élever la voix et encore moins le poing), nous avions inscrit à notre programme un spectacle de ce Gilbert Laffaille. En l’occurrence au Théâtre d’Orsay, au début de l’été 1979, où, si le plaisir pris à l’écoute de ses deux premiers 33 tours (en 1978, Nettoyage de printemps avait confirmé tout le bien qu’on pensait de lui, avec Le Gros Chat du marché, Interrogations écrites, La Ballade des pendules, La Femme image, etc.), nous étions bien décidés à (tenter de) nous présenter à lui.

La suite de l’histoire, Gilbert la raconte lui-même en pages 273-274 de Kaléidoscope, gros livre de 480 pages qui « est un peu le bilan d’une vie – l’enfance, l’adolescence, les études, les voyages, le métier de chanteur, les joies, les peines, les succès, les échecs… – mais aussi une réflexion sur le monde de la chanson d’hier à aujourd’hui ». Un livre, précise-t-il, qui « s’est écrit sans efforts en quelques mois. Etre spontané m’a paru la façon la plus acceptable de parler de ma vie et de ma carrière. Je n’ai bien sûr pas TOUT dit, ce n’était pas le but. (...) Cela répondra peut-être à ces questions si souvent entendues : “Mais qu'est-ce que vous devenez ?” “Pourquoi on ne vous entend plus ?” “Vous chantez toujours ?” » Sait-on jamais en effet : n’a-t-on pas connu certains artistes qui, par exemple, ont noyé leurs déboires en faisant la java... sans modération ?

Orsay, donc. C’était au temps où la chanson occupait sur le terrain la place que les médias lui déniaient dans les ondes, dans le cadre d’un « mois de la chanson » où nous allions assister aux concerts, un différent chaque soir, de Graeme Allwright, Guy Béart, Leny Escudero, Catherine Le Forestier, Claude Nougaro, Quilapayun, Henri Tachan… et autre Laffaille – excusez du peu ! – qui s’en souvient ainsi ; c'était il y a quarante ans (!) :

« Je peux dire que j’ai chanté au musée d’Orsay ! Durant sept ans en effet, le bâtiment d’Orsay qui n’était déjà plus une gare et pas encore un musée, fut transformé en théâtre, dirigé par Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud. J’y avais chanté et, à la fin de mon récital, j’avais rencontré un couple qui se présenta comme “Mauricette et Frédo”. C’était drôle : dans ma chanson Le Président et l’Éléphant, ces prénoms m’étaient venus un peu par hasard, beaucoup pour la rime avec “qui se grattaient le dos”. Ils s’appelaient justement comme ça. C’est ainsi que je fis la connaissance de Fred et Mauricette Hidalgo, qui devaient par la suite m’ouvrir largement les colonnes de Paroles et Musique et de Chorus. L’histoire de ces deux revues est indissociable de la chanson de ces années-là. »

C’était drôle en effet. Drôlement étrange, même : combien de chances, statistiquement parlant, pour qu’un auteur associe nos deux prénoms aussi dissemblables (mes copains, depuis l’adolescence, m’ont toujours appelé Frédo) dans une chanson ? Cela paraît si improbable que nombre de nos lecteurs ont cru ensuite que Gilbert nous connaissait avant de l’écrire. Mais non, la réalité dépasse parfois la fiction ! D’autant plus dans notre cas – et c’est dommage que l’auteur, quitte à vendre la mèche, ait omis de le préciser – que nous arrivions justement d’Afrique et que la situation décrite dans sa chanson était loin de nous être étrangère, l’ayant vécue aux premières loges (ou presque) ! Télépathie, prémonition, simple mais intrigante coïncidence… ou quoi ? Pierre Barouh parlait de « rivières souterraines » à ce propos, et Jung de « synchronicités » : le signe, si une telle sommité a eu besoin d’inventer un mot aussi savant, qu’il y a de quoi s’interroger sur ces hasards et clins d’œil de la vie.

Souvenirs, souvenirs… Le temps a passé. Nous avons consacré un premier dossier à Gilbert Laffaille (entre ceux de Souchon et de Ferrat) en janvier 1981 dans Paroles et Musique, puis un second dans Chorus (outre de nombreux entretiens et articles divers au fil de ses nouveaux albums et spectacles), intitulé « L’impressionniste chantant », à l’automne 1999. Dans l’intervalle, Gilbert avait signé avec un producteur indépendant de mes amis, inconditionnel de Chorus, qui m’avait proposé de lui suggérer, parmi mes artistes de prédilection, ceux qui étaient en quête de producteur. C’est ainsi que Leny Escudero, d’abord, allait pouvoir rééditer en CD ses 33 tours « A Malypense », enregistrer des inédits et réenregistrer en 1996 – sous le double label Déclic/Chorus (mention purement symbolique) – une superbe anthologie de « 20 titres essentiels » réarrangés par Michel Haumont, Une vie… Opération rééditée la même année avec Gilbert Laffaille, et avec le même arrangeur, sous le titre Tout m’étonne.

 Cliquer ici pour lire le dossier de PAROLES ET MUSIQUE n° 6 (janvier 1981) 

Avec ses mots, Gilbert raconte cet épisode important de sa carrière, alors sans label phonographique malgré le grand prix de l’académie Charles-Cros attribué en 1994 à son précédent album (en 1978 il avait déjà reçu le prix de l’académie du Disque français pour Nettoyage de printemps, son deuxième opus) : « Après Ici, je me retrouvais encore une fois sans maison de disques. Un jour au téléphone je m’en ouvris à Fred Hidalgo qui me parla d’un producteur susceptible d’être intéressé : Éric Basset.

Celui-ci dirigeait un catalogue de musique antillaise, un autre de musique bretonne, et il désirait en ouvrir un de chanson française. Il venait de signer avec Leny Escudero et s’apprêtait à produire Yves Jamait. Nous nous sommes rencontrés ; le courant est passé, nous avons signé pour plusieurs albums. Éric était très motivé. Il avait cependant du mal à trouver des distributeurs satisfaisants. C’est ainsi que je me suis successivement retrouvé chez Virgin puis chez Sony et, à nouveau, chez Virgin. Avec lui nous aurons finalement enregistré trois albums studio [dont l’excellent La Tête ailleurs en 1999], un album en public, un vidéo-clip VHS [voir ci-dessous] et un DVD.

» Éric était dynamique et il était pressé. Deux ans après Ici, l’Olympia, et de nombreuses tournées, je n’avais pas eu le temps d’écrire un nouvel album inédit. Il me proposa de réenregistrer une sélection de mes premiers succès et d’y ajouter simplement trois inédits. Dents d’ivoire et peau d’ébène, La Ballade de Jim Douglas et Le Triangle des Bermudes. Pour les arrangements je décidai de faire entièrement confiance à Michel Haumont et de lui confier la réalisation de l’album. (…) Éric Basset mit les moyens et nous avons réalisé l’album Tout m’étonne au studio Acousti avec Alain Cluzeau. Bonne ambiance de travail, confort, beaucoup de rires, j’étais en totale confiance. Je retrouvai le climat de mes premiers disques (…) : une solide équipe, des professionnels efficaces, et surtout du temps, ce qui coûte le plus cher. Dans ce nouvel habillage plusieurs chansons anciennes parurent nouvelles : Tout m’étonne, CQFD, Les Bigoudis par douze, La Maison du passage, Neige, L’Infinitif… Avec les trois inédits cela se tenait, l’ensemble faisait un bel album de vingt et une chansons qui resta plusieurs mois en tête du classement des radios du réseau Quota, fédérant à l’époque une quarantaine de radios indépendantes. »

Un album également labellisé Chorus, dont j’eus la joie (et la fierté) d’écrire le livret, à la demande expresse du producteur, dont voici la teneur (déjà kaléidoscopique !) :

« La chanson, à notre propre image, est un monde à mille facettes où chacun peut faire son marché, au gré de ses humeurs, de ses envies ou de ses besoins. Du titre immortel au plus périssable, elle est ainsi composée d’une litanie de représentations de l’histoire, de l’évolution et des aspirations de l’homme. Miroir fidèle ou “kaléidoscope” à travers lequel, selon l’angle de vision adopté, la vie prend les couleurs les plus diverses, la chanson est un art délicat où, les réussites individuelles ont beau être légion, sa transmutation en “grand œuvre” n’est rien moins qu’ordinaire. Une dimension d’exception que seuls sont capables d’atteindre les auteurs qui, par-delà le temps et les modes, parviennent à conjuguer tous les aspects de leur création, comme les pièces d’un puzzle s’emboîtant finalement les unes dans les autres. Autant d’éléments, d’apparence disparate, qui, juxtaposés, laissent miraculeusement apparaître un ensemble cohérent comme mille points de détail peuvent composer un chef-d’œuvre de peinture impressionniste.

» Il y faut pour cela une petite musique personnelle, une vision du monde, un climat, une philosophie. Du caractère en somme. Car si l’on a tout dit, sans doute, de la vie, de l’amour et de la mort, il est des façons d’aborder aux rivages de l’inspiration qui s’apparentent à la découverte pure et simple, qui renouvellent de fond en comble ces thèmes récurrents. Gilbert Laffaille est un de ces pionniers : sans bruit, sans tapage, sans violence, sans amertume aussi, il va son chemin, défrichant depuis vingt ans une voie nouvelle. Ainsi se bâtit sous nos yeux, chanson après chanson, une œuvre d’une clarté admirable, faite d’ellipses judicieuses, d’images éloquentes, de jeux sur les sonorités, d’éclectisme musical, de mélodies mémorables et d’interprétation subtile d’où affleurent tout à tour (ou simultanément) le sourire, l’ironie, la satire, le doute et la révolte, la tendresse et la compassion. C’est en observateur lucide et critique, parfois chagrin, souvent malicieux, toujours tendre, que Laffaille nous dépeint l’homme et son environnement, social ou naturel, en équilibre instable sur le fil de l’humour et du drame, sans pathos ni grosses ficelles et c’est bien le plus rare dans la chanson.

» Le mot est lancé : Gilbert Laffaille est un artiste rare, et discret – trop sans doute –, comme on en croise peu dans une génération. En témoignent ici, entre quelques inédits, ces petites merveilles réenregistrées en direct et en acoustique, sous une couleur qui, plus encore que dans les versions d’origine, met en évidence l’homogénéité d’un univers aux galaxies pourtant éclatées. Une œuvre qui, à coup sûr, laissera son empreinte dans l’histoire de la chanson française. Comme celle d’un Souchon aujourd’hui ou d’un Boby Lapointe hier, mais à sa manière à lui, façon Laffaille : l’air de rien. »

Qu’ajouter à cela ? Tout était dit… Si ce n’est le silence à venir des médias. Silence persistant depuis ses Beaux débuts, à quelques exceptions près : n’est pas José Artur, Jean-Louis Foulquier ou Claude Villers qui veut… et en a le courage, car la subversion subtile des chansons de Laffaille a fait reculer bien des animateurs et programmateurs du service public comme des grandes stations de radio dites alors périphériques. Et ce, dès le crime de lèse-majesté qu’était Le Président et l’Éléphant ou même Le Bonjour d’Alfred qui relevait, dans le traitement de l’actualité, un accident absolument dramatique de la femme dudit Président :

Le printemps sera précoce
Anne-Aymone s’est fait mal au pied
La France a battu l’Écosse
On est là pour informer !
Sheila attend un enfant
On vous l’a dit les premiers
Trois mille morts au Pakistan
Une page de publicité !

Laffaille, page 35 de son intégrale : « À l’époque mon directeur artistique m’avait dit de faire attention. Écrire une chanson pour brocarder un président de la République qui se permettait des choses indignes était une chose et c’était courageux de ma part (en fait, c’était plutôt de l’inconscience !)… Mais pourquoi diable s’en prendre à l’épouse du Président ? Sur le moment, tout à l’excitation de l’enregistrement de ce premier album, je n’avais pas trop compris cette mise en garde. (…) Mais il avait raison… » Silence radio ! Forcément, entre Anne-Aymone et la satire médiatique… Et une fois que le pli est pris, n’est-ce pas ?... À défaut d’empêcher l’artiste de continuer à tracer son chemin virtuel de mots et de musiques, il le mettra dans l’incapacité physique de croiser celui du grand public. Dommage (surtout pour celui-ci)…

Hors l’écoute et la réécoute, qu’on ne recommandera jamais assez, de ses chansons qui ont oublié de vieillir (hélas, pour certaines d’entre elles, comme Le Gros Chat du marché, Dents d’ivoire et bois d’ébène ou Trucs et ficelles), il vous reste donc à lire cet ouvrage qui, non seulement nous raconte toute l’histoire de l’artiste vue de l’intérieur (ou des coulisses), mais s’interroge aussi sur ce qui nous interpelle nous-mêmes aujourd’hui, qui aimons passionnément la chanson : sur sa place à venir dans la société. Car si la chanson, qui n’est rien de moins que le souffle vital de l’homme mis en musique, existe, existera et se renouvellera toujours sur le terrain, on peut se poser la question de sa « visibilité » face aux « nouvelles musiques » (?) à la mode et au « grand dérangement » actuel – pas celui des populations cher à Houellebecq mais du remplacement progressif, systématique et apparemment inéluctable du lexique français par son équivalent anglais ; c’est tellement plus fashion (les cons ! comme si la mode n’était pas une création purement française…). Pauvre Villon, pauvre Verlaine, pauvre Bernard Dimey !

En épilogue, sous le titre éponyme Kaléidoscope, Gilbert propose un état des lieux et pose les questions qui s’imposent, en tenant bien compte du fait que « les époques ne sont sans doute pas comparables ». Mais quand même : « À mes débuts j’écoutais beaucoup d’Anglo-Saxons et j’ai tenté plusieurs fois de marier l’esprit français et les influences étrangères… Nous verrons si notre chanson parviendra à survivre en tant que telle ou si elle se fondra peu à peu dans le grand flot mondial. On n’entend déjà plus Brassens, Brel, Barbara, Leclerc, Ferré, Béart, Sylvestre, Bécaud, Nougaro, les grands aînés de la chanson française. Entendra-t-on demain Souchon, Goldman, Renaud, Cabrel, Yves Simon ?

» Il y a trente ans, John Lennon disait : “Le rock français c’est comme le vin anglais, ça n’existe pas”. Faudrait-il comprendre cette phrase cruelle comme une invitation à faire ce que nous savons faire ? Nous n’avons de cesse de dénigrer notre patrimoine, à quoi cela rime ? N’avons-nous pas perdu notre âme ? Un rap portugais peut-il être aussi prenant qu’un fado ? Quand Charles Aznavour chantait à Carnegie Hall, avait-il besoin d’emmener avec lui en avion son public venu de France, comme le fit Johnny Hallyday ? Un autre Anglo-Saxon, Sting, n’a-t-il pas déclaré (interview à la revue Paroles et Musique) : “Pourquoi nous copiez-vous ? Vous avez Jacques Brel. Pas nous !” »

Ça donne envie, non ? Peut-être même de poursuivre la discussion en commentaires de ce sujet ? Si c’est le cas (et si c’est pour la bonne cause), j’y participerai avec plaisir... Ce que j’aime aussi dans ce Kaléidoscope (joliment préfacé par Philippe Delerm et illustré de nombreuses photos en situation), c’est son côté bienveillant, j’allais écrire intelligent mais ça risquerait de faire fuir ceux qui pensent que les chansons de Laffaille sont réservées à une élite alors qu’elles sont populaires par essence – sans même parler de ses sketches à l’humour irrésistible, ou plutôt de ses skontchs, invention improbable mi-texte mi-chanson, dont Charlotte (créé en 1980 et uniquement repris dans son Live in Chatou !) reste le modèle le plus déjanté, véritable objet audiovisuel non identifiable.

Bienveillant, disais-je... Mon cher Frédéric Dard (alias San-Antonio) assurait quant à lui qu’il ne fallait pas être méchant, jamais : « C’est du temps perdu ! » Ce qui ne l’empêchait pas, notez bien, de bouillir de colère devant l’incommensurable bêtise humaine… Pareil pour Gilbert qui nous prévient d’emblée avant d’entamer les presque cinq cents pages de ce pavé en petits caractères : « Vous n’y trouverez ni rumeurs ni médisances mais quelques coups de cœur et quelques coups de gueule, des anecdotes vraies, drôles, tristes, cocasses ou étonnantes. »

Un vrai cadeau ! Ce qui me donne envie de vous en offrir un autre ici même : le dossier complet* (réalisé par votre vieil échanson d’ami) du Paroles et Musique de janvier 1981 (introuvable dans le commerce depuis belle lurette), sur lequel Philippe Delerm revient à la fin de sa préface (« Quelle densité de textes poétiques ! J’aime tout, on l’aura deviné. Comme un numéro de Paroles et Musique consacré à Gilbert l’affirmait, il avait tout pour être le futur grand de la chanson française. Sauf que… Sauf qu’en même temps, c’est déjà un miracle, quand on est un patineur subtil, de passer entre les mailles du filet, de tracer un sillage… »). Un dossier que l’intéressé évoquait lui-même en ces termes dans une lettre de décembre 1989, qu’il me permettra de publier ensuite dans mon livre Putain de chanson :

Le mot de la fin ? Évidemment provisoire, malgré ce « bilan » d’une vie d’artiste, car celui-ci continue de cultiver de bien jolies perles** (dix-sept albums au total à ce jour, le dernier en date, Le Jour et la Nuit, remontant à 2013). Une précision plutôt, afin d’enfoncer le clou : à l’image des plus grands, Trenet le premier, Aznavour, Gainsbourg, Higelin, Souchon et les autres, Gilbert Laffaille a tout compris de la nature intime de la chanson française : l’art de conjuguer une mélodie et le meilleur de la langue (quel bonheur !), du rire aux larmes, avec des rythmes et musiques du monde entier. Il y a longtemps, bien longtemps (rendez-vous compte que son premier album était totalement abouti alors que la plupart des grands ACI, Brassens est peut-être la seule exception, n’ont trouvé leur style qu’au bout du deuxième ou troisième disque…) que les médias, plutôt que de faire la sourde oreille, auraient dû le porter au pinacle : l’air de rien, n’incarne-t-il pas la (vraie) French Touch de la chanson ?!

Reste à espérer qu’il n’en soit pas aussi Le Dernier des Mohicans... Ce serait drôle pour quelqu’un qui a passé son enfance et son adolescence à jouer aux cow-boys et aux indiens dans la bonne ville de Neuilly. 

*Il vous suffit de cliquer, sous la reproduction de la couverture, sur le bandeau « Lire le dossier de PAROLES ET MUSIQUE », pour voir défiler ses douze pages l’une après l’autre. Bonne lecture et surtout bon retour au pays des souvenirs...

**Écoutez par exemple Les Raisins dorés sur ce blog à propos de son album En public, accompagné au piano par Nathalie Fortin, auquel nous avions décerné en 2010 un « Quichotte » (distinction réservée aux meilleurs disques présentés ici pendant plusieurs années après la disparition de notre revue Chorus il y a exactement dix ans en cet été 2019 – qui, elle, avait son « Cœur Chorus ») : « Laffaille ? Un Quichotte, c’est sûr, défenseur de la veuve et de l’orphelin, des petites filles de Chiang Maï, des éléphants (mais pas des présidents), de l’Homme avec un grand H… et du fruit de ses vendanges, quand il « fait chanter les verres » : un chevalier des notes et lettres, amateur épicurien – l’un n’empêche pas l’autre – de java sans modération. Ce nouvel album est le quatorzième ou quinzième depuis son premier 33 tours : c’était il y a… trente-trois ans, en 1977. Quatre sketches irrésistibles complètent ici son tour de chant, outre une Ballade des pendules (un sommet de la versification en allitérations) qu’il dit désormais, avec un vrai talent de comédien. Ne manquez pas son numéro, car ce genre de funambule, Ça ne tient (souvent) qu’à un fil… »

NB. Site officiel de Gilbert Laffaille ; Chaîne Youtube de Gilbert Laffaille ; Contact et modalités pour commander le livre (et/ou certains disques) par correspondance.

 

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8 avril 2019 1 08 /04 /avril /2019 13:50

Le Grand Jacques va bien,
il est vivant et habite à Hiva Oa

Imagine-t-on le Grand Jacques terminant sa course, vieillard tonitruant, la nuit de ses quatre-vingt-dix ans, crachant sa dernière dent, en chantant Amsterdam ?! Non, bien sûr que non : quarante ans qu’il est parti, déjà, dans la force de l’âge, à 49 ans, le 9 octobre 1978...

Il n’empêche que le 8 avril reste une date indélébile dans la mémoire de ceux et celles pour qui Jacques Brel est à jamais quelqu’un d’unique, par son œuvre évidemment mais aussi (et surtout peut-être) parce qu’il est le seul chanteur francophone de l’ère contemporaine à s’être mis concrètement, physiquement, désespérément, jusqu’au péril de sa propre vie, en adéquation totale avec l’humanisme de ses chansons. Au pied du mur. Là où il n’est plus question de tricher : « C’est trop facile, Grand Jacques, de faire semblant… »

Il lui fallut pour cela, ayant compris très tôt que « l’aventure commence à l’aurore » pour espérer atteindre un jour l’inaccessible étoile et accomplir enfin son impossible rêve, se lancer à corps perdu dans un extraordinaire voyage au bout de la vie... Quitte à perdre celle-ci, à force d’altruisme et d’abnégation (et d’un peu d’inconséquence, aussi, face à la maladie) ; mais en lui faisant gagner l’Éternité non seulement dans le cœur (tendre) des Marquisiens, qui adoraient l’homme (dont ils ignoraient tout du passé artistique), mais dans l’histoire même de la chanson... vivante. Tout simplement.

PS. Brel, après Brassens (dont je vantais deux belles reprises du Testament et, en catalan, de La Mauvaise Réputation, dans le dernier sujet de ma page personnelle) et San-Antonio, quoi de plus logique ? Ce dernier m’avait raconté en riant ses retrouvailles avec le plus rabelaisien et iconoclaste des chanteurs belges, dans sa loge, le soir de sa toute dernière à l’Olympia : Frédéric Dard, admiratif et débordant d’enthousiasme, et Jacques Brel, relativisant l’événement, pince-sans-rire et modeste en même temps (voir Le Voyage au bout de la vie, page 67)...

Quant à Brassens, personne n’ignore que Brel et lui étaient les plus grands amis du monde. On se souvient de Brel disant de Brassens, versant professionnel : « Je crois que c’est un péché mortel de ne pas écouter Brassens. On peut ne pas l’aimer, on ne peut pas ne pas l’essayer », et puis, versant personnel : « J’insiste sur le sourire de Brassens qui est le plus beau sourire d’homme que je connaisse. » Un sourire qui avait disparu lorsque Georges prononça douloureusement ces mots le jour de la mort de Jacques, qui demeurent un sommet d’émotion pudique :

Jacques Brel et Georges Brassens finalement réunis comme par miracle par-delà le temps et l’espace (merci Monique...) dans le village d’Atuona, île d’Hiva Oa (archipel des Marquises), grâce à un galet signé « Georges Brassens » ayant surfé sur la vague et vogué depuis Sète jusqu’à la dernière demeure de son camarade du Plat Pays, pas loin de la plage, à vol d’oiseau, qu’elle surplombe en majesté... Atuona, aux Marquises où le temps s’immobilise et où le Grand Jacques reste plus vivant que jamais dans le cœur des gens.

 

NB. 1) Sur Jacques Brel, le voyage au bout de la vie, voir, écouter et lire sa revue de presse, entre autres avec les deux émissions suivantes :
• Sur France Inter :
« Le Temps d’un bivouac », avec Daniel Fiévet (une heure).

• Sur France Culture : « Le Réveil culturel », avec Tewfik Hakem (une demi-heure).

2) Sur l’album collectif Ces gens-là, sorti à l’occasion du 90e anniversaire de la naissance de Jacques Brel, interprété par treize artistes de générations et d’horizons différents (Thomas Dutronc, Gauvain Sers, Marianne Faithfull, Slimane, Bernard Lavilliers, Melody Gardot, Oxmo Puccino, Liv Del Estal, Carla Bruni, Michel Jonasz, Zaz, Madeleine Peyroux et Claudio Capéo, dans l’ordre d’apparition sur le disque), voir ce sujet explicatif avec plusieurs vidéos.

 

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